A quelques jours des premières échéances nationales en cette saison olympique et paralympique, Rémi Gaspard, directeur de la performance de la FFCK depuis fin 2021, dresse pour nous un état des lieux du haut-niveau français
CKM – Pouvez-vous nous dresser un rapide bilan de la saison 2023:
RG : L’enjeu majeur de la saison était la prise des quotas olympiques en slalom, sprint, et paralympiques en paracanoë.
Ensuite, la stratégie était de pouvoir sélectionner les athlètes olympiques en Slalom dès le mois d’octobre pour avoir une longue préparation, tout en mettant en place en parallèle l’équipe qui allait chercher les quotas restant aux rattrapages en Sprint et Para, et au TQO pour le Kayak Cross.
Bilan des 3 disciplines olympiques et paralympiques :
- Slalom :
Avec 4 quotas sur 4 possibles et 3 médailles d’argent décrochées aux mondiaux en 2023, le bilan du slalom est plutôt positif. On a ensuite essayé de trouver la meilleure stratégie pour poser une sélection olympique qui a pour objectif de maximiser les chances de médailles. Désormais, nous devons aller chercher les quotas en Kayak Cross.
- Sprint :
La stratégie en kayak, et en canoë était focalisée sur le biplace. Le K2 dame et le C2 Homme décrochent les quotas, ce qui nous a permis dès l’automne de leur proposer une préparation singulière. Ces résultats ouvrent aussi la possibilité aux athlètes du biplace de concourir en C1H 1000 et K1D 500.
Le C2 Dame était compétitif et nous permet d’entretenir l’ambition d’obtenir ce quota au rattrapage.
En Kayak homme l’énergie était sur le K4, mais cela n’a pas fonctionné, on a buté sur une concurrence mondiale féroce.
- Para :
On a obtenu deux quotas en KL3D, et KL1H. Les autres résultats montrent aussi que l’on peut avoir l’ambition d’obtenir d’autres quotas aux rattrapages.
« À la suite de ce bilan, on a donc identifié les athlètes, puis réorganisé les équipes d’encadrement »
À la suite de ce bilan, on a donc identifié les athlètes, puis réorganisé les équipes d’encadrement. On est resté sur 4 entraîneurs olympiques en slalom, dans une stratégie de continuité. Derrière, nous avons un encadrement qui continue à travailler et à suivre le collectif et les jeunes.
En sprint, il y a plus de changements. On a confirmé Anthony Soyez dans la continuité de la collaboration avec le C2 et François During Directeur de la performance adjoint, pour accompagner les deux bateaux ayant obtenu les quotas.
Ensuite, nous allons nous reconcentrer à l’issue du Temps d’Identification National sur le binôme à mettre en place en K2 Hommes. On va travailler pour encore progresser avec ceux ayant déjà obtenu leurs quotas, réaffirmer les niveaux individuels et les futurs objectifs sont d’aller chercher les quotas continentaux en K2H et C2D.
Aucun athlète n’est encore officiellement sélectionné pour les JO, il faudra confirmer le niveau de performance à la coupe du monde pour confirmer leur participation aux JO.
On est donc passé d’un modèle d’encadrement catégoriel à un système de préparation olympique. Ensuite, on a un entraîneur à Vaires-sur-Marne (Guillaume Berge) et un entraîneur à Cesson (Herman Le Marrec). Mikael Ortu continue à renforcer l’équipe d’encadrement.
En para, l’équipe d’encadrement sera aussi dans la continuité, sauf pour une athlète qui après bilan et volonté commune, change d’entraîneur.
Toute cette temporalité de choix était prévue dans la feuille de route, avec des bilans et une organisation à mettre en place après les championnats du monde 2023, dans l’ordre des priorité suivantes :
- Préparation olympique de sélection longue
- Projet de recherche de quotas supplémentaires
- Projet de la relève
Quelles ont été les stratégies de préparation ?
La stratégie du Para est tournée autour des deux athlètes leaders : Nélia et Rémy déjà sélectionnés sur la saison 2024. Avec eux un collectif avec 3 à 5 athlètes qui se préparent pour les TIN du 29 mars avec en ligne de mire les mondiaux de Szeged, qui est aussi le rattrapage olympique.
La stratégie globale, c’est de se mettre dans les conditions ou l’impact du quotidien n’existe plus, avec en volume en stage très important.
Chez les sprinter, la préparation hivernale s’est surtout passée en Guadeloupe pour le C2H et le K2D. On a un partenariat qui permet de s’entraîner dans de très bonnes conditions.
La stratégie en slalom est de ne pas isoler les olympiques et de faire la préparation au sein du collectif France.
Le mois de novembre a été principalement fait sur le site de Vaires. Ensuite, en décembre, l’équipe olympique s’est rassemblée à La Réunion pour construire ensemble le projet olympique.
Les projets se sont ensuite individualisés en fonction des besoins de chacun et des choix de la concurrence internationale.
On avait signé le retour à Vaires/Marne au 4 mars avec la volonté d’être tous ensemble. On a passé une super semaine au sein du collectif France, avec un travail catégoriel qui est mis en avant, et une collaboration de l’ensemble des entraîneurs.
La nouvelle stratégie en slalom, c’est le focus sur la réussite des Jeux olympiques, mais c’est aussi de commencer à amener la dynamique 2028/2032 que l’on souhaite, avec une approche catégorielle. La ligne directrice : faire en sorte que la catégorie soit la meilleure du monde.
Qu’est ce qui nous attend désormais ?
On rentre dans la période de compétitions nationales, qui va permettre de créer les équipes de France de chaque discipline.
« La priorité n°1 c’est les Kayak Cross. Puis, on se posera alors la question des athlètes pertinents pour aller courir en slalom »
En slalom, l’enjeu n°1 des TIN est de sélectionner une équipe pour aller chercher le quota kayak cross au TQO.
La priorité n°1 c’est les Kayak Cross. Puis, on se posera alors la question des athlètes pertinents pour aller courir en slalom. Car on n’oublie pas que sur cette saison, outre le quota kayak cross, on cherche à construire une équipe de France avec 3 objectifs :
- La gagne
- Maximiser le nombre de bateaux en finale,
- Avoir des athlètes qui se projettent vers 2028.
Les coupes du monde 4 et 5 seront réouvertes en fonction des résultats du premier bloc mondial.
« La priorité, c’est de sélectionner le C2D et le K2H qui seront compétitifs à Szeged «
En sprint, la priorité, c’est de sélectionner le C2D et le K2H qui seront compétitifs à Szeged pour aller chercher les quotas. En tant que pays hôte, nous avons déjà les quotas mono (K1 1000h et C1 200 féminin). On va concentrer notre énergie sur ces biplaces.
En mai à la suite de ces courses, on aura donc l’équipe olympique définitive, et il restera donc 2 mois pour réajuster la stratégie.
En para, la priorité est l’accompagnement des athlètes ayant obtenu les quotas en 2023, l’énergie va également sur la préparation du mondial, essentiellement en VL3 Homme et Dame et en KL3 Homme. Ce championnat du monde de Szeged sera un temps clé pour finaliser la composition de l’équipe paralympique, et ainsi préparer la réussite de ce collectif au mois de septembre.
Quels sont les objectifs pour Paris 2024
Les objectifs sont fixés par le ministère :
- 5 médailles dont 2 titres
Para :
- 3 médailles dont 1 titre
Ce sont des objectifs ambitieux, mais quand on regarde la manière dont on se prépare, ça donne envie. On n’oublie pas que l’on est une nation qui essaye de revenir vers un leadership, nous avons les moyens de nos ambitions.
On a pu voir un peu de frustration cet hiver chez certains athlètes, quel regard portez vous sur ces remous ?
Nous avons certes des moyens, mais nous avons fait le choix de les concentrer sur les projets qui avaient obtenu des résultats lors de la dernière saison et notamment ceux déjà qualifiés et ceux ayant obtenu des quotas. Cependant, nous n’avons délaissé personne : des athlètes qui sont très engagés sont maintenant aidés avec le socle commun. Il y a une possibilité ciblée pour l’individualisation avec le travail des experts extérieurs etc…
Ce choix là amène de la frustration et de la crispation. D’autant que ce sont des jeux à la maison, beaucoup en rêve, plus que d’habitude, mais à la fin nous avons le devoir de rester concentré sur l’objectif. Mais il existe en France des structures et entraineurs pour tous.
Et pensez-vous à l’après jeux :
On commence déjà à construire ce que l’on souhaite pour l’après JO. Il y aura des élections fédérales, avec des orientations politiques renouvelées, mais les fondamentaux resteront les mêmes, avec des athlètes qui cherchent à performer au niveau international, des entraîneurs engagés dans ce projet qui doit continuer à avancer.
On ressent une forme d’inquiétude en sprint sur la relève, partagez vous se ressenti ?
Il y a un bilan, qui est partagé avec les clubs. Derrière, il y a des pistes de travail qui sont ouvertes, maintenant il faut réussir à mettre en place des choses.
Il faut que l’on ait des réflexions sur les écoles de sport, pour garder cette culture de compétition au sein de nos clubs et de nos structures d’accession. Cette situation n’est pas singulière au sprint. L’ensemble de l’écosystème est engagé et passionné. L’enjeu est de réussir à coordonner d’avantage l’ensemble sur le parcours de progression des athlètes, l’offre d’expérience de compétition et le lien entre les différents cercles d’encadrement, du club jusqu’au Collectif France.
Ensuite, nos structures d’accession nationale font du bon boulot, mais il y a la transition 18-21 ans qui est difficile.
Les choix et la stratégie que l’on a choisi en 2019 avec la mise en place du collectif France est réaliste par rapport aux exigences de performance internationales. Cela crée dans certains cas une marche importante entre la finalité du parcours d’accession et l’entrée dans le parcours d’excellence. On va rester dans notre philosophie d’amélioration continue pour faire évoluer les choses.
Fin de l’interview
Le programme du week-end
Ce week-end ce sera donc le dernier grand rendez-vous du canoë kayak avant les JOP 2024 sur le stade nautique olympique de Vaires-sur-Marne. Un gros programme en perspective ! En effet, 3 compétitions vont se chevaucher :
- Vendredi 29/03 – SPRINT – Temps d’identification national (20 athlètes)
- Samedi 30/03 – SPRINT – Tests nationaux de mars (120 athlètes)
- Samedi 30/03 – KAYAK CROSS – Temps d’identification national (65 athlètes)
- Dimanche 31/03 et Lundi 01/04 – SLALOM – Manche de Nationale 1 (180 athlètes)